Du courage politique ?

Petit debrief du forum Littoral qui s'est déroulé donc ce matin à Lacanau et qui avait pour but de présenter les grandes orientations de la stratégie locale de gestion de la bande côtière mise en oeuvre par la commune.


Pour rappel Lacanau peut être considéré comme un site test pionnier en la matière puisque dès 2009 elle a osé affronter de face cette problématique si complexe et si délicate politiquement à aborder en raison de la si difficile acceptation sociale qu'elle engendre.

Si un réveil est évidemment nécessaire au plus haut niveau de l'Etat pour prendre au sérieux cette problématique quitte à légiférer sur la question, il faut saluer le courage politique de la commune qui va de plus en plus dans le concret sur cette question quitte à aborder sans complexes la question de la relocalisation.

Pour rappel, l'Aquitaine a la chance d'avoir une définition et une projection de l'aléa Erosion sur la région et bénéficie d'une stratégie régionale qu'il s'agit de décliner localement.

Si "l'évolution naturelle surveillée" est l'option choisie pour des sites naturels (tels que ceux du Conservatoire du littoral ou de l'ONF), c'est bien "la lutte active souple ou dure" qui d'habitude est retenue de manière générale sur la côte sableuse.

Le "repli stratégique" quant à lui peut prendre plusieurs forme :
  • déplacement
  • suppression (= déconstruction)
  • relocalisation
La grande question pour Lacanau est donc de choisir entre la lutte active et la relocalisation.

La relocalisation est un concept ambitieux c'est évident, voire même idéalisé puisqu'il permettrait :

  • la préservation des dynamiques naturelles,
  • la sécurisation des personnes impactées,
  • de créer une opportunité de repenser l'organisation même d'une commune littorale.
Toutefois ce concept demeure encore conceptuel il faut l'avouer en raison de la sacralisation du concept de la propriété en France, et surtout du vide juridique qui existe pour sa mise en oeuvre et bien évidemment sa prise en charge financière.

Le forum du jour a eu l'avantage de laisser parler le public en vue d'exploiter au mieux l'intelligence collective pour ce type d'opération d'envergure. Là encore, les organisateurs - mairie en tête - a su prendre les coups, entendre, écouter, tout en restant assez droit dans ses bottes et décidé dans sa démarche courageuse.

Pour résumer grossièrement les options voici quelques chiffres que les deux stratégies donneraient :
  • Relocalisation de l'ensemble du périmètre de vulnérabilité : près de 300M€ (26 ha concernés).
  • Lutte active dure : 70M€ pour des travaux jugés "gigantesques" (sans compter les coûts chaque année liés à l'entretien des ouvrages de protection ou la construction de nouveaux au grès des tempêtes)
Ce qui est certain quoiqu'il en soit, c'est que "l'inaction n'est pas un choix possible" comme l'a clairement dit le Maire. Il faut apprécier également le Maire qui poursuivit son propos en osant déclarer que "découstruire, relocaliser ne constitue pas une cicatrice du front de mer" et ce point est important. Il participe de la tentative de certains ici ou là de faire comprendre aux habitants qu'une autre manière de ressentir, de vivre près de l'océan est possible.

Il a donc été décidé en conclusion, dans l'attente de la résolution par les services de l'Etat du vide juridique et de la question de l'outil adéquat pour mettre en oeuvre le programme de la relocalisation (nouvel établissement public foncier régional ?), de mettre en oeuvre une politique de lutte active jusqu'en 2018 avec un certain nombre de travaux dits "sans regrets" listés et présentés, dans l'attente d'ici cette date de la décision prise en concertation du choix stratégique définitif de la commune.

Lacanau, il faut l'admettre, demeure donc encore une fois pionnière en avançant, pas après pas, lentement mais sûrement, vers l'inéluctable. 
D'autres secteurs de la côte Aquitaine sont concernés et on attend avec impatience les présentations prochaines des communes voisines qui se lancent dans le projet : le Cap Ferret (pris en tenaille par une double érosion océan/bassin), les deux agglos basques et la commune de Capbreton seront notamment suivies de près tant les enjeux sont également pharaoniques en termes de foncier...et donc de coût potentiel.

La relocalisation n'est donc plus un gros mot, même si elle suscite toujours autant de débats et d'inquiétudes légitimes, en premier lieu de la part des propriétaires en front de mer ! Elle finira pourtant par devenir la règle tôt ou tard. Autant donc tâcher de transformer avant d'être devant le fait accompli tout cela en force, en opportunité pour permettre de repenser notre manière de vivre au bord de l'Océan, notre manière de penser l'urbanisme en commune littorale, notre manière de "Vivre avec l'Océan" comme le répète inlassablement Hugo Verlomme.



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